Cela fait plusieurs fois que je tombe sur un MySpace notamment en cherchant des infos musicales; les groupes de zic semblent s'y être mis depuis un bail.
Bon ça me rassure, on ne couche pas entre gens de MySpace. Sinon je n'imagine pas les générations de décérébrés... :roll:Libération! a écrit :MySpace à moi
Les réseaux sociaux s'étendent à toute vitesse sur le Net. Accélérateurs de rencontres, outils professionnels, ils sont aussi de formidables pompes à fric.
«Quand tu tombes là-dessus, ça devient une drogue énorme. Tu navigues dans l'univers MySpace sans t'arrêter», raconte David Guillon, 20 ans et déjà plusieurs années d'Internet derrière lui. En janvier 2004, il est l'un des premiers Français à découvrir le site américain qui vient d'être créé. Il passe «trois mois à ne faire que ça». David remplit son profil, «résume une vie en quatre minutes», décrit ses images, ses sons, ses références culturelles, de préférence ultrapointues.
Dès l'inscription à MySpace.com, on se voit proposer de mettre en ligne une photo de soi. Ensuite, depuis sa page, on tient un journal, on lance des invitations, on montre ses photos, on échange avec ses amis... Un univers de pages personnelles où chacun se présente et reçoit des messages. L'ensemble crée une zone communautaire, difficile d'accès pour les non-initiés mais qui renforce le sentiment d'appartenance de ceux qui y sont entrés. C'est un monde parallèle, à la fois global et fermé sur lui-même. «Ça se termine quelquefois sur messagerie instantanée, de temps à autre autour d'une bière, rarement dans un lit», raconte Dorothée, 25 ans. Le soir, cette standardiste retrouve parfois ses amis «myspacers» au Truskel, un bar musical du IIe arrondissement parisien, point de rendez-vous de quelques-uns des internautes.
«Un modèle de revenus intéressant»
Parfois appelés «réseaux sociaux», ces sites, dans lesquels on compte aussi Friendster.com ou Tribe.net, se hissent désormais au sommet des classements mondiaux d'audience du Web. «En France, MySpace n'a pas encore touché tout le monde. Ceux qui connaissent, pour l'instant, ce sont les jeunes, plutôt riches et urbains», décrit Rémi, 19 ans. L'Internet, les fringues et la musique sont les centres d'intérêt principaux de cette communauté techno-branchée. Aux Etats-Unis, en octobre, MySpace, après seulement deux ans d'existence, a surpassé eBay, AOL et Google pour devenir le troisième site le plus visité (1). Il n'est plus devancé que par Yahoo et MSN.
L'entreprise, rachetée l'été dernier par le groupe News Corp de Rupert Murdoch, n'est pas avare de statistiques et on la comprend : elle revendique 40 millions de membres inscrits, 160 000 nouveaux membres chaque jour... «Seuls Yahoo et MSN vendent plus de publicités que nous, annonce Chris DeWolfe, 39 ans, le PDG. Nos membres sont principalement dans la tranche 16-34 ans, ce qui nous rend attractifs auprès des annonceurs. Nous avons un modèle de revenus intéressant.» D'autant plus intéressant que ce sont les utilisateurs qui fournissent la matière du site. «Nous n'avons pas à payer pour le contenu, notre personnel, environ 160 personnes, s'occupe surtout de technique et de l'assistance aux utilisateurs.»
Les spécialistes appellent ça des sites «au contenu généré par les utilisateurs», à l'instar des blogs (journaux de bord) ou des podcasts (séquences audio mises en ligne par les utilisateurs). Plus de la moitié des adolescents américains sont concernés (2). Ils ont créé un blog ou une page web, mis en ligne des photos, des textes ou des vidéos ou remixé dans leurs propres créations du contenu trouvé en ligne. «On assiste à un mouvement de fond, affirme John Furrier, créateur d'un site de podcasting (PodTech.net). Avec son ordinateur, on peut en même temps consommer, publier et partager.»
Bistrot ou société secrète
Sociologue au Centre étude sur l'actuel et le quotidien (CEAQ), Stéphane Hugon pense que «ce nouveau mode de mise en relation est en passe de devenir un véritable phénomène de société». Avec, selon lui, des différences entre les pays : aux Etats-Unis, ce type de sites est couramment utilisé pour chercher un travail ou un contact professionnel. «Là où les Américains font avant tout du networking social un outil stratégique, les Européens en font un lieu de sociabilité, dénué d'arrière-pensées commerciales ou de finalité utilitaire. On fait des connaissances, on s'entraide, on vient chercher une ambiance ou un bain identitaire.»
Ces sites marqueraient même un retour à des pratiques oubliées. «Il faut probablement y voir un retour de rituels sociaux qui avaient tendance à disparaître. Ces lieux virtuels remplacent un peu le bistrot ou les relations de voisinage, voire les réseaux plus discrets ou les sociétés secrètes. Un passionné de vieilles voitures ira chercher sur un forum les réponses à ses questions techniques et donner l'adresse d'un bon petit garagiste.» Pour Stéphane Hugon, il existe une «économie du capital social». Sans se rencontrer forcément dans la réalité, on mutualise ses moyens, des gens donnent, d'autres reçoivent, et inversement. «Assez discret, voire muet, le networking est en passe de devenir un instrument extrêmement puissant, et à la portée de tous.»
Déclencheur de carrière musicale
A ses débuts, MySpace visait avant tout à mettre en contact des musiciens avec leur public. Le cofondateur Tom Anderson étant musicien, son idée était de faire du site un outil de promotion pour les groupes et les artistes. «C'était après avoir vu la page du groupe new-yorkais Fannypack que je me suis mis à MySpace», raconte David, qui s'est enregistré sous son nom de musicien, «datA», et pour qui le site se révèle un accélérateur de carrière. Plus de 660 000 groupes ont créé des pages, diffusent de la musique, donnent leurs dates de concert et communiquent avec leurs fans. Beaucoup d'inconnus, qui espèrent ainsi sortir de l'anonymat, mais aussi des groupes et des artistes renommés comme Beck, Queens of the Stone Age ou Weezer. «Les musiciens malins en matière de marketing ont vite compris l'intérêt qu'ils pouvaient tirer du site», affirme Tom Anderson, 29 ans, qui préside la société.
Chaque utilisateur peut envoyer ses compositions sur sa page perso, et choisit de les laisser ou non en téléchargement gratuit. «On peut stocker et faire écouter des morceaux très facilement. Pour les musiciens non signés, cela permet de se faire connaître», s'enthousiasme Fabien, 21 ans, étudiant à Sciences-Po qui passe une année à Washington. Nimrod, rockeur nancéien de 23 ans, peut en témoigner. En utilisant le site comme un outil professionnel, il a déjà décroché quelques dates de tournée pour son groupe Hymen. «En deux mois, 6 000 personnes ont déjà écouté nos morceaux en téléchargement libre. C'est un moyen de communication hallucinant pour des groupes de province isolés.»
Aux Etats-Unis, des stars ont créé leurs propres pages MySpace. Certains, comme les rockeurs new-yorkais The Strokes, ont déjà gratifié le site de quelques morceaux inédits pour les tester avant leur sortie commerciale. En France, la présence de Snoop Dogg ou Daft Punk dans ce monde parallèle fait avancer l'idée d'une proximité immédiate entre un artiste et ses auditeurs, via les messageries. David Guillon s'en souvient : «Au début, c'est fou, t'as vraiment l'impression d'avoir décroché leur numéro de portable, de pouvoir les joindre à tout moment.»
Pas étonnant que le site ait suscité des appétits, et particulièrement celui de Rupert Murdoch, magnat américain. Le «mogul» s'étant aperçu qu'une partie croissante de la publicité filait sur le réseau, il a lancé cet été un département chez Fox avec un mot d'ordre : racheter des sites pour capter la manne. En juillet, les deux cofondateurs de MySpace ont accepté de se faire avaler par Murdoch pour 580 millions de dollars. Le moyen, affirment-ils, «de grandir plus vite, de lancer d'autres activités et de se lancer à l'étranger». Après le label musical, créé en novembre, suivront une version chinoise du site et une station de radio satellite.
«Ma mère connaît Google, pas MySpace»
Comme les blogs de Skyrock en France, MySpace incarne une rupture générationnelle. «Passé 40 ans, l'audience chute, explique Tom Anderson. Ma mère connaît Google, elle ne connaît pas MySpace.» La différence, selon lui : «C'est une génération qui n'a pas grandi avec l'Internet. Et elle arrive peut-être à un âge où on a moins envie d'étendre son cercle social.» Murdoch lui-même s'était présenté en avril comme un «immigré du numérique» par opposition aux «natifs du numérique» trop âgé pour tout comprendre de l'Internet mais obligé de forcer sa nature pour continuer de faire prospérer son groupe.
Le succès de MySpace n'est pas pour autant un passeport pour la pérennité. Son concurrent Friendster a vu sa fréquentation chuter ces derniers mois. Et certains internautes en sont déjà revenus. Laura Chancellé, serveuse au Truskel, reconnaît qu'elle a trouvé plein d'amis sur le site. «Il y a en a même un avec qui j'ai passé trois jours à Nice. Mais ça reste quand même un milieu très branché et un peu énervant.» David, lui, a l'impression d'avoir un peu fait le tour et utilise moins le site. «On finit par décrocher. Aujourd'hui, le site me sert surtout de messagerie. Comme il y a énormément de sons disponibles mais qu'il faut bien faire un choix, je ne vais plus que sur les pages que je connais déjà. Je me balade moins.» Mais c'est grâce à MySpace qu'il a noué des contacts avec un label, Ekler'o'shock, qui pressera bientôt son premier maxi.
(1) En termes de pages vues, selon l'institut ComScore Media Metrix.
(2) Selon une étude du Pew Internet & American Life Project, spécialisé dans les usages du réseau.
http://www.liberation.fr/page.php?Article=344750
(non, je n'ai pas de compte MySpace, pourquoi? ^^)